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Le Large.

 

IMG_8563.JPG 

La chambre était restée en l'état. Le lit défait de la nuit laissait une impression de désolation. Il ne le refit pas, se leva sans prêter attention au désordre habituel qui régnait chez lui. C'était comme une de ses lois naturelles qu'il avait lui-même instituées dans la conception de sa vie élaborée à partir de la philosophie classique dont il avait fini par admettre la pensée ! Sans même avoir pris quelque chose, un café ou un thé vert, il se mit à écrire le passage qui lui trottait dans la tête, depuis cette nuit mouvementée. Tout devait être porté sur le papier immédiatement, sinon tout se perdrait à jamais.

Etant rentré très tard ou plutôt tôt vers le matin, il s'était endormi avec son souvenir omni présent. D'ailleurs, depuis cette rencontre, il lui fut difficile de l'oublier ; mais, il savait également, par expérience auprès des filles puis des femmes, que leur cruauté est bien réelle et qu'elle est partie intrinsèque de leur constitution. Il savait aussi que souvent elles en étaient, hélas !, victimes.

Alors, il se leva, regarda sa chambre, en portant son regard sur les objets qu'il aimait et auxquels il restait très attâché. Mais le temps de repartir vers des aventures plus importantes, engagées par les idées qu'il défendait depuis toujours, se faisait de plus en plus sentir ; aussi longtemps que sa mémoire pût le porter dans les lointains souvenirs, il se rappela que la vie, pour lui, s'était présentée sous les aspects de la Liberté ! C'était le critère évident par lequel il accéderait à l'émancipation individuelle de l'être ; tandis qu'autour de lui, il n'y avait que désolation humaine.

Ramassant quelques effets à la hâte, attrappant son appareil photographique avec lequel il avait couvert tous ses reportages, il s'empressa de quitter les lieux, où il s'était juré de ne point vieillir.

D'ailleurs, vieillir, pour lui, s'était mourir dans l'élan de sa propension idéaliste, avec des idées intègres n'ayant pas subi la corruption de l'esprit ! 

C'est ce qui lui importait le plus à ce jour. Partir au large, loin, très loin de cette civilisation perturbatrice et destructrice des valeurs auxquelles il avait cru et croyait encore !

Le bateau était toujours à quai. Il allait mettre les voiles pour Zanzibar. C'était incroyable, mais l'équipage cherchait un homme à tout faire, une espèce de maître polyvalant, capable de gérer les situations les plus complexes, dans des circonstances à risque. 

Il n'avait plus rien à perdre. Personne ne l'attendait. Les femmes n'avaient fait que passer dans sa vie, sans marquer de véritables sincérités qui eussent pu le retenir pour vivre une authentique histoire d'amour ; même celle qu'il avait aimée, lui apparaissait insipide, vide de sensibilité et sans intérêt particulier qui l'eût retenu,  pour la vie. Et c'est vrai qu'en soi, les femmes sont communes qu'elles ne présentent guère de différence entre elles. Et lorsqu'elles éssaient de se distinguer les unes des autres, elles finissent par retomber dans cet état reccurrent qui les confond malheureusement !

Il monta donc à bord, proposant ses services, en trichant sur son âge, quand le maître d'équipage lui avait demandé de décliner son identité. Il s'attribuait toujours dix ans de moins ; c'était sa règle ! Son histoire était tronquée dans son existence. Il en avait intentionnellement gommé un passage : le plus intense, le plus fort, le plus grand dans l'épopée de son engagement !

 

IMG 8717 - Copie

 

Le matin du premier jour de septembre, la voile du navire fut déployée pour regagner le large. Se perdant au-delà de la ligne d'horizon, le navire disparut emportant avec lui cet homme dont personne ne sut réellment qui il était, d'où il venait et où il voulait véritablement aller...

 

Jean Canal