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La Lutte.

IMG 2900 - Copie - Copie

 

J'étais alors à Carcassonne. Nous étions au mois de juillet. Je me rendais aux Rencontres de Pétrarque, à Montpellier. J'avais décidé de faire halte dans cette ville médiévale qui avait pris des allures de cité anodine ressemblant à toutes les autres avec ces boutiques stéréotypées véhiculant l'image du capitalisme en vigueur. Avant d'arriver sur une place, je vis une affiche mise en évidence sur un panneau de bois exposé au passant : "Lutte ouvrière" vendait son journal sur le pavé. Après avoir photographié ledit, je me mis à le lire quand une belle enfant de cette force politique de la Gauche de la Gauche, dirais-je, vint vers moi, me tendant le journal de la Lutte. Elle était blonde avec de beaux yeux bleus. Sa jeunesse ne défavorisait pas son savoir dans le domaine politique ; elle connaissait son sujet par cœur. Elle me fit l'apogée du monde ouvrier et du travail ! Moi qui avais mené une vie d'assisté : ancien hippie, ancien prisonnier de droit commun, ancien militaire engagé, ancien étudiant en Lettres classiques, ancien directeur artistique chez  Picture, ancien de tout, quoi ! J'avais même dispensé des cours de catéchisme aux enfants bourgeois des classes aisées à Toulouse, ma ville natale. J'avais obtenu de grandes satisfactions en ayant exposé mes photographies dans différents pays : Allemagne, Suisse, Mexique et France. Je savais que j'allais finir avec le minimum retraite vital que l'état et a fortiori l'Europe adopteraient dans une décennie, faute de pouvoir donner du travail à tous ! Je l'écoutais donc, parce que ces idées étaient nobles, propres et pensées dans un élan de sincérité que l'on ne retrouve pas dans la politique médiatisée ; elle y croyait ! Et moi de l'écouter et de l'admirer pour son jolie minois, je finissais par y croire aussi et je me dis au fond de moi que si la vie le voulait encore, je ferai un redoutable révolutionnaire mais dans un idéal perdu ! Je me voyais partager sa vie. Elle, militant pour des causes surranées. Moi, écrivant des livres que jamais personne ne lirait ! Il me semblait qu'entre nous l'amour, le grand Amour fut possible ; c'était moi qui avais vieilli et qui, malgré tout, n'y croyais plus. Je croyais encore à la Révolution, certes ! Aux exécutions publiques sans procès sur les parvis des places consacrées. Au châtiment des coupables politiques qui avaient plongé la société dans son état délétère actuel ! Et si c'était à refaire, je crois que c'est Elle que j'aurais choisie ; car ses idées étaient aussi belles que sa beauté... Et comme je suis de ces hommes qui savent aimer, comme très peu savent le faire, je lui dispenserai un amour inouï qui la rendrait plus libre dans sa vie ! Car, pour moi, ce qui importait le plus, c'était la Liberté !

 

Jean Canal